13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

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13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par AngstromCyclo »

Salut à tous

J'ai brièvement fait allusion au voyage que ma cyclote et moi avons fait au mois de juillet. En voici le premier de 3 volets.
13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire (1/3)
C’est un voyage prévu et annulé déjà 2 fois, en juillet, que nous avons fait avec ma cyclote. Un périple de 13 jours depuis la Meuse vers la Belgique, un petit bout de Pays Bas, Allemagne et Luxembourg. Motivation: découvrir, visiter de la famille, échapper à la chaleur du Sud.
Cette fois-ci, pas de compte rendu méthodique et chronologique mais un récit sur ce que nous avons vécu et ressenti, au fil des jours.
Tout a commencé en Argonne, une forêt coincée entre la Meuse et la Champagne. Nous y avons laissé la voiture dans de la famille de ma cyclote qui y possède une maison de famille.
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Eglise abbatiale cistercienne de Lachalade
Toujours sympa de pouvoir rendre visite à des cousins quelques fois un peu éloignés mais à qui un voyage à vélo nous donne l’occasion de rendre visite. Ça se produira encore 2 autres fois lors de ce voyage, puisque ma famille maternelle est belge.
L’Argonne est un territoire si proche du front de la première guerre mondiale que la traversée de ce paysage majoritairement forestier puis des terres agricoles bordant la Meuse nous ont plongés dans l’histoire tragique d’il y a un siècle. Notre itinéraire, pourtant tracé sur carte routière et non pas historique/touristique, nous conduit parmi les stigmates du conflit: ici un cimetière militaire français, là allemand, plus loin américain. Même sans les rechercher, on ne peut les éviter.
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Mémorial américain à Varennes-en-Argonne
Et donc, forcément s’y arrêter, ne fut-ce que quelques minutes, repenser à cette tragédie mondiale et ce gâchis humain. Impossible d’en faire abstraction. A Montfaucon, c’est sur une butte bien raide que nous grimpons en silence et pacifiquement sur notre destrier alors qu’il y a plus de 100 ans ce sont les troupes américaines qui se sacrifiaient en grand nombre pour conquérir ce point stratégique, probablement dans un feu assourdissant et obtenir le 26 septembre 1918 la victoire de la bataille Meuse-Argonne qui jouera un rôle dans la victoire ultime menant à l’armistice.
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Restes de l’église de Montfaucon, Argonne
Nous avons commencé par une petite étape, permettant à ma cyclote de se rassurer compte tenu d’un certain nombre de douleurs articulaires ou musculaires qui l’embêtent depuis plusieurs mois; et aussi de nous épargner un gros orage. Nous serons donc inhabituellement tôt au camping, ce qui nous a permis de visiter le village de Dun/Meuse et son église perchée sur un éperon d’où elle domine la rivière et son large lit.
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Eglise de Dun-sur-Meuse
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Dun-sur-Meuse vue de l’église
Bon camping avec baignade dans le lac où nous verrons quelques cyclistes car c’est une étape sur la Meuse à vélo, la vélo-route qui suit le fleuve.
Le lendemain, par contre, l’étape sera plus longue.
Sur les bords des routes nous repérons souvent ces bornes imposantes qui matérialisent les positions atteintes par les troupes américaines au moment de la signature de l'armistice en novembre 1918.
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Passage par Montmédy, sa citadelle qui nous vaudra une ascension “tout à gauche”. Nouvelle trace des tensions séculaires entre France et Allemagne puisque cette citadelle elle est bien ancienne et a été plusieurs fois modifiée pour garder sa pertinence militaire au fil des “progrès” des techniques et tactiques . J’ai cependant été un peu déçu de l’état de réhabilitation à l’intérieur de la citadelle, mais très impressionné par l’épaisseur des murs d’enceinte et du système de protection d’entrée.
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Porte de la première enceinte citadelle de Montmédy
Le temps s’est mis au beau sans être trop chaud. Super. C’est ce qu’on cherchait.
Notre objectif est d’atteindre Florentville en Belgique ce soir, en passant par l’abbaye d’Orval pour la visiter. Pour cela, nous prendrons des petites routes qui nous font passer par une surprenante basilique plantée en pleine campagne, ND d’Avioth, surnommée la “basilique des champs”.
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Notre-Dame d’Avioth, “basilique des champs”
Nous approchons tant et si bien la frontière que nous tombons sur ce poste de douane "vintage.
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Ces petites routes nous ont bien plu
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jusqu’à ce qu’un flot de frontaliers nous importune d’une manière assez incroyable sur l’une d’elles qui est quasiment sur la frontière. Alors que nous sommes arrêtés sur cette route étroite, moi d’un côté de la route et Catherine de l’autre pour une petite pause photo,
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une voiture passe entre nous sans un ralentissement ! Doublant un monsieur âgé marchant sur la route un peu plus loin, je m’arrête pour demander si ce que nous venons d’expérimenter est exceptionnel ou habituel. Il me confirme que matin et soir, c’est comme ça avec les frontaliers qui partent ou reviennent du Luxembourg.
Qu’à cela ne tienne, 300 m plus loin nous sommes en Belgique sans que rien n’ait marqué le passage de la frontière, si ce n’est l’état et la largeur de la route. Nous arrivons rapidement à Orval, une abbaye connue et même reconnue pour sa bière trappiste. C’est splendide.
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Nous ferons la visite, très intéressante, que nous conseillons vivement à ceux qui viendraient dans le coin.
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L’abbaye est blottie dans le font d’un vallon creusé dans les contreforts des Ardennes. Logiquement, nous poursuivons notre route qui grimpe dans la forêt avec 2 passages bien raides car nous devons monter de 150m d’altitude pour nous hisser au niveau de la vallée de la Semois qui constitue un seuil des Ardennes. Le paysage change totalement mais à ce stade c’est surtout la recherche du camping qui nous occupe. On arrive trop tard pour le premier. Heureusement, car le second sera le bon. Un super camping à la ferme équestre tenus par un couple très sympa.
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Une grosse journée s’est passée avec 72 km et 750m de D+ (contre 600 de D-).
Le troisième jour nous permettra de rejoindre Belvaux, charmant petit village sur la Lesse où nous feront étape chez mon cousin. Le but est d’y arriver en milieu d’après-midi pour pouvoir passer un peu de temps ensemble. Nous découvrirons de beaux paysages, d’abord en longeant la Semois,
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alternant forêts, zones agricoles de polyculture-élevage sans oublier des passages de vallées creusées par les rivières, ce qui donnera du relief à l’étape. Nous ferons une halte dans la forêt de Sainte Cécile
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pour une demi-heure d’orgie de framboises sauvages délicieuses.
S’ensuivront une série de descentes et de montées, au gré des affluents rive droite de la Meuse qui nous mèneront à Tellin à la limite Ardennes/Famenne avant notre dernière descente de la journée vers Belvaux et les bords de la Lesse où nous ferons étape et dormirons dans un lit.
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Dernière modification par AngstromCyclo le dim. 3 sept. 2023 10:01, modifié 3 fois.


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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par AngstromCyclo »

13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire (2/3)

Le lendemain, le départ est forcément un peu retardé. La route qui quitte Belvaux pour mener à Han commence par un bon raidard. Le plus dur de la journée. Pause ravito rapide à l'épicerie de Han/Lesse (village célèbre pour ses grottes), nous continuons en direction de Rochefort, par les petites routes. La Lesse trouve sur ces terres de Famenne un espace qui la laisse dessiner de jolis méandres dans les prairies. On n'est plus dans les bois et les vallées escarpées qu'elle s'est creusées en amont.
Passage rapide à l'Abbaye de Rochefort.
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Presqu'aussi célèbre pour sa bière qu'Orval, elle ne se visite pas, contrairement à sa cousine trappiste. Des travaux assez importants perturbent le calme habituel. Qu'à cela ne tienne, nous la connaissons et ne sommes pas en avance sur notre programme; nous continuons sans nous attarder par des chemins balisés en itinéraires vélo. La région est propice au tourisme à bicyclette et la Wallonie aussi a adopté le système "Points-Nœuds". Il ne nous est pas utile car la trace est chargée dans le GPS et nous apprécions une fois de plus le confort du guidage GPS alors que nous nous faufilons dans la campagne. Nous apprécions aussi le vent dans le dos, d'autant plus qu'il est soutenu. Le contraire aurait été pénible. Dans les faux-plats descendants, vent dans le dos, nous nous prenons pour des cyclosportifs. Les moyennes sont inhabituelles. Nous sommes loin d'être les seuls cyclistes mais par contre, nous ne somme pas nombreux à nous déplacer à la seule force des mollets (et du vent): nous sommes désormais installés définitivement dans l'ère du cyclotourisme assisté et aurons désormais - et pour le reste du voyage -le net sentiment d'appartenir à une espèce entrain d'être complètement ringardisée. La couleur des cheveux (la même que les miens) devient majoritairement gris, et les vélos utilisés sont majoritairement de gros engins électrifiés. L'assistance électrique change le public de cyclotouristes, ce qui n'a pas que des avantages.
Il est l'heure de déjeuner quand nous parvenons à Hotton, jolie bourgade sur la rivière Ourthe. Malgré un pique-nique bien prévu, nous ne pouvons résister à l'envie d'un cornet de bonnes frites belges. Comme nous sommes 2, nous pensons qu'un cornet de taille "grande" devrait être largement suffisant. Eh bien !! suffisant il fut. Une taille "normale" aurait été parfaite pour nous 2! Bienvenue en Belgique. Elles étaient très bonnes.
L'Ourthe est un affluent important de la Meuse. Elles se rejoignent à Liège. Nous passerons le reste de la journée à la suivre de plus ou moins loin.
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Cela nous amènera à la vieille ville de Durbuy, une cité très ancienne lovée dans un méandre de l'Ourthe. Visitée au moment opportun, c'est sans doute agréable. Mais j'avoue qu'avec l'âge, je supporte de moins en moins ces "plus beaux villages de ..." surfréquentés, leur inféodation au business, leurs restaurant innombrables, leur "montée en gamme" qui semble être le seul moyen d'espérer limiter la fréquentation en sélectionnant par l'argent. 1 heure sur place et pour moi, 50 mn de trop. Heureusement, on sort très rapidement de ce nouveau type de parc d'attractions commerciales manucuré, habillé de vieilles pierres partout (par terre, sur les murs, sur les toits). de parkings payants (les voitures y sont désormais le plus souvent exclues, ce qui me va évidemment très bien). En quelques centaines de mètres nous sommes de nouveau dans une belle nature, sur une belle piste cyclable qui longe l'Ourthe dans tous ses méandres et de laquelle la route a été éloignée. Magnifique section, à travers de belles futaies de feuillus. L'automne ici doit être somptueux.
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Piste cyclable au bord de l'Ourthe, en aval de Durbuy
Notre objectif du jour: la ville de Hamoir (un restaurateur espiègle y exploite un restaurant qu'il a nommé avec plein d'humour " Hamoir et à manger"), où un autre cousin viendra nous récupérer en voiture.
A Bomal, le fléchage vélo nous offre une alternative: soit continuer le long de l'Ourthe, soit la quitter. Nous comprenons grâce à la mention "interdit en cas de crue" que l'itinéraire le long de l'Ourthe est plus "VTC" que vélo de route. C'est celui que nous choisirons, et nous ne le regretterons pas, malgré le fait que la roulabilité réduite nous ralentit. C'est très bucolique et il fait assez chaud.
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Nous piquerons rapidement une tête dans la rivière (un incontournable de nos vacances estivales à vélo) en un lieu très calme, loin de la circulation automobile, un peu à l'entrée de gorges.
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Ceci nous met un peu en retard pour notre rendez-vous à Hamoir mais rien de méchant.
La soirée et la journée du lendemain sont très agréables. Nous retrouvons le confort d'un logement en dur pour 2 nuits supplémentaires et surtout, c'est l'occasion de retrouver des cousins que je n'avais pas vus depuis très longtemps. La cousine a fait signe à ses frères et sœur et le mercredi, nous roulons tous ensemble sur une jolie boucle dans le Limbourg, cette province belge calée contre les Pays-Bas dont Hasselt est la capitale. Le paysage est majoritairement constitué de vergers, nos hôtes nous apprenant que la province a depuis plusieurs années misé sur le tourisme à vélo notamment pendant la période de floraison des fruitiers. Une petite journée à vélo bien agréable, sans sacoches, terminée par un bon BBQ. Les vacances, quoi!
Le jeudi, nous sommes à nouveau conduits en voiture pour retrouver notre itinéraire vélo à Maastricht. Journée spéciale car nous retrouvons Pierre (alias Pedrodaluna du forum) qui est parti la veille de Bruxelles avec son fils. Nous prévoyons de rouler ensemble cette étape, de bivouaquer au pied des Ardennes et de nous séparer le lendemain. Nous nous retrouvons sur la place du marché de cette ville néerlandaise célèbre pour le traité européen qui y fut signé, mais dont nous ne connaissons rien si ce n'est qu'il s'agit d'une très belle ville.
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Pierre et moi nous connaissons depuis le projet des 7 Majeurs 2021 et c'est avec plaisir que je le retrouve et le présente à mon épouse. Le fils de Pierre est un long gaillard de 17 ans, courageux, à qui son père a fait démarrer l'expérience du voyage à vélo par une étape de 120 kilomètres! :yikes Le courant passe d'emblée, sans surprise, tant Pierre et moi nous retrouvons sur notre approche du cyclotourisme comme sur d'autres sujets. Après quelques tours de roues pour découvrir quelques bribes de cette ville effectivement très belle et très animée (surtout en ce jour de marché), nous traversons la Meuse Image
qui semble avoir décuplé depuis que nous l'avons quittée près de Verdun et nous engageons sur une pente ascendante de quelques dizaines de kilomètres dans la campagne néerlandaise.
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Les options finales n'ont pas été décidées. Pierre a suggéré que nous passions par le "Point des Trois Frontières", sommet des Pays-Bas matérialisant la jonction des frontières néerlandaises, allemandes et belges, d'une altitude de 324 m. Proposition qui m'a immédiatement plu. L'hésitation concerne Aix-la-Chapelle, ville historique s'il en est, qui était pourtant dès le début du projet un point clé de l'itinéraire. Finalement, nous ferons l'impasse, préférant prendre notre temps pour ne pas arriver tard au bivouac et ne pas risquer une journée qui finit "dans le rouge".
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Une haute tour est construite sur ce point haut. Nous y monterons, en quête d'une jolie vue sur les 3 pays et ne le regretterons pas.
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Finalement de là-haut nous verrons bien Aix-la-Chapelle, distante de seulement une dizaine de kilomètres, à défaut de la visiter.
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Ca nous suffira pour aujourd'hui.
Nous quittons ce point géographique remarquable en direction de la Belgique, en route pour les Hautes Fagnes, région la plus haute du pays au pied desquelles se trouve notre lieu de bivouac. Pas du bivouac sauvage à proprement parler. L'ONF belge a créé 3 aires de bivouac dans ce massif, où l'on peut réserver (gratuitement) pour une nuitée. Aucun aménagement n'est prévu, ce qui est un peu dommage.
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La forêt est très belle. La Soor, le ruisseau qui descend des Hautes Fagnes, est limpide. Il nous offre la possibilité d'un bain glacé qui remplacera avantageusement la douche du soir.
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Le lendemain, le temps est beau au lever du jour. On en profite car cela ne va pas durer. Le camp est vite levé et nous entamons une longue et très belle montée sans grande déclivité sur une route forestière goudronnée. Quelques animaux surpris détalleront devant nous. Le ciel s'assombrit, conformément aux prévisions puis c'est la pluie.
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Catherine et moi arrivons juste à un abri où nous trouverons refuge car la drache est sévère. Pierre et son fils sont derrière et nous les verrons arriver quelques minutes plus tard déjà bien trempés. Ils continuent, n'ayant plus rien à perdre alors que nous restons abrités en espérant une accalmie. Illusion que nous garderons 10 minutes, avant que nous nous décidions, bien recouverts de ponchos et autres vêtements de pluie, chaussés de nos crocs "spécial pluie" de repartir. Les derniers kilomètres de montée se passent sur une nationale bien passante mais la météo a dissuadé les touristes, habituellement nombreux, de venir en nombre. Quand je parviens à la baraque Michel, Pierre et son fils sont attablés à l'auberge. Ils ont commandé une soupe et une omelette pour compléter un petit dej frugal et se réchauffer. Le front est passé et avec lui la pluie. Quand nous ressortons, le ciel est bas mais il fait sec. Nous découvrons un pneu plat sur le vélo du fils de Pierre que nous pouvons réparer rapidement. Photo au point culminant de la Belgique, le Signal de Botrange (694m) qui est tout sauf un sommet. Un simple point géodésique dans un magnifique paysage de tourbières.
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Pas spectaculaire mais très beau. La météo nous gratifie d'une belle ambiance et d'une affluence faible.
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C'est ici que Catherine et moi, Pierre et son fils, nous dirons au revoir, après un peu plus de 24h passées ensemble. Ils redescendront vers Verviers pour un retour vers Bruxelles en train alors que nous poursuivons, cap au Sud-Est en direction de l'Allemagne. C'était super de se revoir et très sympa de sa part de s'être organisé pour venir rouler avec nous. Nous convenons d'essayer de refaire cela une autre année.
Puisque nous sommes au point culminant du pays, nous ne pouvons nous aussi que descendre. Nous rejoignons la Vennbahn, une célèbre voie verte sur emprise d'une voie ferrée transformée comme souvent en piste cyclable. Cet itinéraire commence en Allemagne, poursuit en Belgique et se termine au ou proche du Luxembourg. Nous n'en parcourrons que quelques dizaines de kilomètres, car nous bifurquerons vers la partie Est de la Belgique, germanophone (3ème langue officielle du royaume). Une découverte pour nous: malgré des voyages en Belgique depuis ma plus tendre enfance, je n'étai jamais allé dans cette partie rattachée à la Belgique après le traité de Versailles. Au bord d'un joli lac, nous retrouvons des champs de framboises (que nous serons les seuls à cueillir).
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Retardés par des courses un peu longues, nous accélérons, ce qui ne m'empêche pas de m'arrêter pour une photo sur la LPE Meuse/Rhin (les habitués connaissent mon intérêt bizarre pour les LPE).
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Nous craignons d'arriver trop tard pour le camping car par ici, tout ferme plus tôt qu'en France. Inquiétude assez fondée mais par chance, nous trouverons le responsable du camping malgré la fermeture. Nous allons passer notre première nuit en Allemagne dans ce petit camping sans aucune autre tente: uniquement des maisonnettes, caravanes et autres bungalows.
4 étapes: J4 : 72 km
J5 (boucle avec cousins): 36 km
J6 (avec Pierre): 58 km
J7: 62 km.
Dernière modification par AngstromCyclo le dim. 3 sept. 2023 10:11, modifié 1 fois.


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Beuzeville 130
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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par Beuzeville 130 »

Cela nous amènera à la vieille ville de Durbuy, une cité très ancienne lovée dans un méandre de l'Ourthe. Visitée au moment opportun, c'est sans doute agréable. Mais j'avoue qu'avec l'âge, je supporte de moins en moins ces "plus beaux villages de ..." surfréquentés, leur inféodation au business, leurs restaurant innombrables, leur "montée en gamme" qui semble être le seul moyen d'espérer limiter la fréquentation en sélectionnant par l'argent. 1 heure sur place et pour moi, 50 mn de trop

Idem pour moi Vincent... nous avons aussi fait la même expérience avec Kerhinet dans la Grande Brière cet été...
Beau parcours, très personnalisé... et un CR toujours bien fouillé. Bravo


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AngstromCyclo
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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par AngstromCyclo »

Beuzeville 130 a écrit : ven. 18 août 2023 14:51 Beau parcours, très personnalisé... et un CR toujours bien fouillé. Bravo
Merci Michel.


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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par Quidam »

Tout à fait d accord ! On attend le dernier épisode ! :)


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masu39
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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par masu39 »

Merci pour ce beau récit!


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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par JessicaB »

Super CR , merci :bravo3

Dis ? C'est quand la suite ? :mrgreen:


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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par AngstromCyclo »

JessicaB a écrit : mer. 30 août 2023 20:03
Dis ? C'est quand la suite ? :mrgreen:
Pour très bientôt. :wink:


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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par masu39 »

AngstromCyclo a écrit : jeu. 31 août 2023 10:30
JessicaB a écrit : mer. 30 août 2023 20:03
Dis ? C'est quand la suite ? :mrgreen:
Pour très bientôt. :wink:
Va falloir penser à se mettre au boulot, hein? :wink:


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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par Ray_Mee »

Très bon récit illustré qui donne envie de repartir sur les routes :lol: bravo à tous les 2.


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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par CYCLOHC »

Nous sommes aux aguets pour la suite des événements... :D


Sans cap, tous les vents sont contraires....
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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par AngstromCyclo »

Dernière partie: Allemagne Luxembourg et Lorraine.


Nous passerons cette huitième journée qui commence dans la région volcanique qui s'appelle l'Eifel. Elle est réputée en Allemagne pour la randonnée, pédestre et cyclotouristique. Le paysage est marqué par les silhouettes des volcans, moins hauts qu'en Auvergne mais bien présents et visibles dès qu'on prend un peu de hauteur car le paysage est la plupart du temps dégagé. Nous ferons un crochet pour aller voir un très beau petit lac de cratère où nous nous baignerons dans une eau cristalline délicieuse.
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Mais pas si vite couraillon, on n'en est pas encore là! Ce matin, moins de 10 kilomètres après le départ, nous commençons par faire le détour par le très joli village de Kronenburg, perché sur des hauteurs.
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Il nous causera une bonne suée car j'avais choisi un itinéraire calme pour y accéder mais il s'est révélé un peu violent pour un début de journée, à froid, avec des pourcentages autour des 15%, ce qui est rude avec un vélo à près de 40kg. Nous ne regretterons néanmoins pas cet effort, si ce n'est Catherine qui aurait dû mettre pied à terre plus tôt car elle a forcé et ça lui a réveillé des douleurs dorsales qui l'ont gênée pendant le reste de la journée.
L'itinéraire a suivi un moment une vélo-route sur voie verte construite sur une emprise d'ancienne voie de chemin de fer, puis nous avons changé de vallée, ce qui nous a obligé à de nouvelles grimpettes mais qui nous ont menés sur les hauteurs où les paysages étaient bien plus intéressants qu'en fond de vallée.
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Paysage volcanique de l'Eifel
Nouvel exemple des limites de ces voies cyclables, que nous préférons panacher avec des portions d'itinéraires "cousus main".
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Quelques passages sur des chemins agricoles roulants. Merci cycle.travel.
En fin de journée, nous décidons de camper dans une forêt. J'avais repéré sur la carte topo un bois dont la partie supérieure me semblait suffisamment plate pour offrir un spot de bivouac à plat et à l'abri des regards. En effet, j'ai lu un peu partout qu'en Allemagne, le camping sauvage est interdit. Aussi, après un peu de temps passé dans le bois pour repérer le meilleur emplacement,
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la tente est installée sur un "délaissé" de chemin forestier, avec impact nul sur la forêt et n'étant d'aucune manière susceptible de gêner le déplacement d'un engin.
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Nous décamperons au petit matin sans avoir tenu l'horaire cible de 7h que nous avions estimé être celui auquel les forestiers embauchent. Estimation correcte car à 7h, les premières tronçonneuses se sont fait entendre mais éloignées de 500m à 1 km de nous. Excellente nuit par ailleurs.
Nous aurons confirmation que le camping sauvage ne fait pas du tout partie des habitudes des locaux. Le lendemain matin, au premier village atteint, nous nous mettons en quête d'eau pour préparer notre petit déj. Une habitante à qui nous demandions de nous indiquer un robinet public nous a gentiment proposé de le faire chez elle. Soudain, prenant conscience que nous voyagions en autonomie, la tente attachée sur le porte-bagage arrière ne permettant pas vraiment le doute, son visage change et prend un air interrogateur : "where did you sleep?". Ma cyclote a été plus rapide que moi pour lui faire une réponse suffisamment ambiguë pour provoquer le doute qui suffira à cette gentille dame pour faire disparaître la méfiance qui avait soudainement et momentanément surgi. Elle nous indiqua le robinet de son garage avec prévenance, ce qui nous permit de préparer le petit dej un peu plus loin, bien installés au soleil déjà chaud malgré l'heure matinale.
L'étape qui commence en cette belle journée nous permet de rejoindre la vallée de la Moselle, terroir extrêmement réputé dans cette partie de l'Europe pour ses vins blancs. Un peu comme l'Alsace en France.
Nous le ferons en utilisant un des nombreux itinéraires cyclables installé sur ancienne emprise ferroviaire. Les allemands en raffolent et en l'occurrence, celui-ci nous convient parfaitement car il nous permet de rejoindre notre objectif rapidement, alors que la densité d'habitation et d'activités économiques augmente et avec elles le trafic sur les routes. En plus, la vitesse de déplacement sur une ancienne voie ferrée est parfaitement optimisée puisque nous passons en 35 km de la région volcanique avec des altitudes autour de 400m à la Moselle un peu au-dessus de 100 m, soit une pente moyenne autour de 1% de faux-plats descendants très réguliers. Les voies ferrées semblent assez nombreuses dans cette région frontalière de la Belgique. Je ne peux l'affirmer mais je pense qu'elles ont joué un rôle militaire dans la seconde guerre mondiale...
La Moselle en vélo est au moins aussi célèbre en Allemagne que la Loire à vélo en France.
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C'est l'une des premières vélo-routes allemandes qui a bénéficié de gros investissements marketing autour de l'œnotourisme à vélo, dans cette région déjà fort réputée (croisières fluviales notamment). Nous ne souhaitons pas "faire la Moselle à vélo" c'est à dire parcourir l'ensemble de l'itinéraire, mais découvrir cette région vinicole et ses paysages de vignobles en terrasses
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et surtout, plus en amont, la ville de Trèves. Notre objectif est donc d'arriver à Trèves le lendemain matin en début de matinée pour visiter cette ancienne capitale romaine qui est restée à toutes les époques de l'histoire une ville importante et donc qui offre un éventail de styles d'architecture surprenant. Nous remonterons donc la rivière tout l'après-midi
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et ferons étape dans un camping très agréable à Trittenheim, aux prix raisonnables pour l'Allemagne (24€ pour 2), avec une attention sympa: une grande bouteille de bière offerte aux cyclistes. On a eu de la chance car il était 18h05 et la réception du camping avait, comme souvent là-bas, fermé à 18h00. J'ai retrouvé la propriétaire en fouinant un peu derrière les bâtiments et elle est revenue ouvrir sa réception pour nous (et un couple de cyclos hollandais arrivés encore plus tard) sans aucune remarque ni démonstration d'impatience.
Le lendemain, alors que la canicule sévit en France, nous sommes sur le vélo à 7h45. Le village est encore à l'ombre du versant opposé et le thermomètre du compteur affiche 11°C. On s'est bien couvert mais c'est frisquet. Ca ne durera pas. Plus loin dans le méandre nous retrouvons le soleil et petit-déjeunerons agréablement dans un très joli décor mosellan. Pendant ce voyage, nous avons été amenés à tester une nouvelle manière de démarrer la journée: réveil, démontage, départ puis petit dej dans les 30 à 60 mn suivantes, à un endroit qui nous plait. On peut mieux préparer les affaires la veille, sans se presser; et avec cette organisation, on a l'impression de gagner du temps, d'être en capacité de mieux profiter des heures fraîches. Etre à jeun pendant les premiers kilomètres ne nous pose pas de problème.
Nous arriverons à Trèves vers 11h cadenasserons les vélos à un arceaux, sécurisant les sacoches grâce à un câble et irons visiter la ville et ses monuments à pieds. J'aurais pas fait ça à Montpellier. :roll:
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La place du marché à Trèves
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Place du marché et Eglise St Gandolf
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Porta Nigra, la porte d'entrée dans la ville de Trèves, capitale de l'empire romain occidental sous Constentin
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Eglise Notre-Dame de Trèves qui jouxte la cathédrale St Pierre
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La basilique Constantin, église protestante qui m'a beaucoup plu par sa simplicité. Elle fut reconstruite après la 2nde guerre mondiale
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Palais princier et ses beaux jardins
A 15h nous repartons en ayant l'impression d'avoir bien profité de cette jolie ville dont nous recommandons fortement la visite. Nous continuerons de remonter la Moselle pour trouver un camping agréable. Le second sera le bon. Nous avons appris la leçon et arrivons donc tôt (pour nous) au camping situé au bord de la Moselle dans la dernière localité allemande avant le Luxembourg. Soirée très agréable avec saucisses frites bières dans le "bierstube" au bord de la rivière, sorte de guinguette locale.
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C'est le lendemain que nous franchirons le pont qui marque la frontière et que nous quitterons la Moselle. Direction Echternach, jolie bourgade luxembourgeoise où nous avons envie de passer la journée pour aller randonner à pieds sur un sentier très connu, à juste titre, le Mühlental. Après être passés au camping pour installer la tente, nous nous engageons pour 7 km de rando dans un massif surprenant de futaies de hêtres et autres feuillus somptueux, traversant des formations géologiques surprenantes.
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Le tout à l'ombre. Retour en bus gratuit, comme tous les transports en commun du Grand Duché. Un service impressionnant, avec des cadences très fréquentes même à la campagne, et d'une grande ponctualité.
Le lendemain est notre avant dernier jour de rando. L'objectif est de nous rapprocher le plus possible de notre destination où nous récupérerons la voiture. Je m'étais cassé la tête pour trouver le bon plan qui consiste à rejoindre Luxembourg ville, la capitale d'où nous prendrons un TER pour Longuyon (54), avec changement à Longwy.
Le trajet entre Echternach et Luxembourg se déroule sur une très belle piste cyclable construite sur emprise ferroviaire qui nous permet de bien voir la campagne luxembourgeoise qui ne comporte pas de spécificités particulièrement remarquables. Par contre, ce qui est absolument remarquable, c'est la place donnée au vélo dans ce pays, et particulièrement les aménagements cyclables pour rentrer dans la capitale. Infrastructure entièrement en site propre, fléchage parfait pour rejoindre la gare depuis la campagne, aménagements astucieux qui font passer par endroit, au centre, dans des parcs où certaines allées sont réservées aux vélos, les autres étant du coup réservées aux piétons. Mais le clou, c'est la traversée du pont Adolphe qui enjambe le parc Pétrusse et le méandre où il se niche. Construit au début du 20ème siècle, il est un axe automobile important de la ville car il mène à la gare. Nous suivions le fléchage pour la gare avec attention (la marge de manœuvre était maigre) et connaissant un peu, je savais qu'il fallait prendre le pont. Mais le fléchage indiquait de prendre à droite, vers un souterrain qui me semblait passer dessous, comme sur les voies sur berge sous un pont à Paris, pour nous emmener faire un détour. Pas enchanté à l'idée de perdre du temps, j'hésitais donc à choisir plutôt de passer sur le pont avec les voitures afin de rejoindre au directement la gare. Déjà engagé dans la descente vers le souterrain, je renonce à cette option et continue. Et là, énorme surprise! Le panneau m'indique la gare tout de suite à droite à un carrefour que je n'attendais pas et nous nous retrouvons sur une piste cyclable et piétonnière suspendue au pont!!! Avec en prime une très jolie vue sur le parc en contrebas. Ca fait plaisir de voir comment ce paradis fiscal utilise l'abondance d'argent (une petite partie, j'en conviens) pour adapter aussi bien son environnement au vélo.
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Il nous faudra à peine plus d'une heure avec la correspondance à Longwy pour atteindre Longuyon. Partis d'Echtenarch le matin, nous avons roulé exactement 3 h ce qui nous a permis d'attraper le TER de 12h30. Timing parfait. Le train suivant offrant la correspondance dont nous avions besoin était vers 17h!
Nous nous retrouvons donc dans cette petite bourgade de Lorraine à 13h30. Les rues sont désertes, les commerces qui n'ont pas tiré définitivement le rideau sont rares mais fermés. Nous recherchons un café, ce qui normal compte tenu de l'heure et de nos rituels mais n'est finalement pas si facile. Roulant à 10 km/h max, je erre en scrutant les rues à la recherche du troquet et concentré sur autre chose, je passe une voiture arrêtée à un feu, tourne à droite dans la rue principale. Pas d'autre véhicule en vue. Et là "tuuut". Je me fais klaxonner par le conducteur du véhicule au feu qui, une fois le feu passé au vert me rejoint, s'arrêt à mon niveau et m'interpelle par sa fenêtre de droite ouverte:
- "*t'as pas peur pour ta vie!!!"
Moi:
- "?????"
Comprends pas.
En fait, le gars m'explique par la fenêtre que je venais de "griller" le feu en passant à 5 km/h et il me rappelais à l'ordre. Je lui explique, très calme, qu'étant concentré sur ma recherche d'un café ouvert et qu'en l'absence de toute circulation, j'avais tourné à droite, très lentement, mais effectivement sans m'arrêter. Je n'avais pas l'impression d'avoir inquiété quiconque et encore moins eu l'impression de prendre un risque pour ma vie mais ai concédé que je n'avais pas respecté le feu rouge. Et je lui demande dans la foulée s'il ne peut pas me renseigner :
"connaissez-vous un café ouvert?"
Il a paru surpris par ma zenitude (vive les vacances!), semblant s'être préparé à un échange d'invectives. Après une brève hésitation il me renseigna très correctement puis s'éloigna.
Le troquet qu'il m'indiqua au bout de la rue, je vous le donne en mille, était "Le café du commerce".
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Si je n'étais pas sur la "diagonale du vide", au moins me trouvais-je dans une France où tout semblait s'être arrêté dans les années 80, au moment où le pays a tourné la page de la sidérurgie dans cette région.
La patronne nous reçoit dans son bar PMU où, comme partout, la télé diffuse des courses que je n'ai jamais vu personne regarder. Pas difficile de trouver une place, le lieu est vide. On commande comme d'habitude un petit noir et un cappuccino pour madame.
Puisque nous sommes seuls dans cette grande pièce, il est facile d'engager la conversation. La tenancière, initialement un peu distante, l'air austère mais soigné avec ses cheveux coupés très courts peroxydés, ses sourcils marqués au crayon nous répond. Après nous avoir jaugés, nous, ces touristes qui avons avec elle en apparence si peu en commun, elle se prête largement au jeu de raconter son pays; sa vie même! Enfin quelqu'un qui s'intéresse! Nous passerons bien une demi-heure comme ça. Pas gênée de faire attendre un habitué entré dans le bar pour terminer son récit. Tout y passe. Elle nous raconte la fierté des habitants de la région d'avoir "construit la France":
- "Monsieur, tous les boulons de la tour Eiffel ont été fabriqués ici!" dit-elle d'une voix cassée qui lui impose d'appuyer sur une sorte de bouton sur la gorge d'un doigt de sa main gauche pour faire fonctionner ce qui lui reste de cordes vocales et pointant fièrement l'index de sa main droite vers le plafond.
Elle nous "raconte la guerre"; sa guerre plutôt (elle a plus de 80 ans et ne les fait pas). Puis elle répond à mes interrogations sur la fermeture des mines et des aciéries. Je comprends que Longuyon ne devait pas sa prospérité à l'activité minière ou sidérurgique elles-mêmes, localisées plus au Nord autour de Longwy, mais à son emplacement stratégique et son rôle de nœud ferroviaire où tout ce que cette industrie lourde produisait passait pour être acheminé dans le pays et ailleurs. Très vite dans la discussion elle évoque la promesse de F. Hollande de ne pas fermer les aciéries. Alors qu'en passant à Longwy en TER je cherchais vainement des vestiges des usines, seuls quelques lampadaires dépassant des arbres qui transforment inexorablement en friche l'ancienne gare de triage m'avaient donné seulement l'indice de ce que je cherchais ... et la valeur de la promesse électorale de FH.
Compte tenu de ma curiosité, madame la tenancière nous recommanda de traverser la rue pour obtenir plus de réponses et des conseils à l'office du tourisme. Bonne idée. 30 secondes après avoir chaleureusement salué cette dame attachante et ses quelques clients accoudés au comptoir, nous voici dans le wagon en cours de rénovation hébergeant l'OT de Longuyon (référence bien sûr au rôle de la ville mentionné plus haut). Cette fois-ci la discussion vire plutôt sur la seconde guerre mondiale et la ligne Maginot qui passe à quelques kilomètres de la ville. Malgré la sympathique initiative de la dame de l'OT qui appelle le fort de Fermont dans l'espoir de retarder la visite du de 14h30, dernière de l'après midi, le temps que nous y arrivions (elle n'avait aucune idée du temps qu'il nous faudrait pour parcourir les 7 km avec des montées, juchés sur nos vélo chargés), nous n'irons pas cette fois-ci visiter ce site. Il propose la visite en train électrique des installations et dispose d'un musée semble-t-il très complet.
Ca tombe bien car nous avons choisi de faire étape ce soir à Moirey, à 30 km en direction de notre destination finale que nous devons atteindre demain, si possible en milieu d'après-midi.
Quand je dit "choisi", il faut quand même dire que de choix, nous n'avons pas eu. J'ai trouvé ce camping à la ferme après une longue recherche infructueuse d'hôtels, de campings, de gîtes d'étape autour de Longuyon. Un désert ! Finalement, c'est sur le site "Bienvenue à la ferme" que j'ai déniché ce camping. Coup de bol, il était pile sur notre route et à la bonne distance pour couper notre dernière étape. Restait bien sûr la solution bivouac. Les 30 km roulés dans l'après-midi sont très agréables, traversant une campagne sans circulation autre que les engins agricoles affairés à rentrer la paille, alternant avec des traversées de jolis bois. Nous nous sentons bien: le retour au pays peut-être.
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Nous aspirions à une soirée calme ... En arrivant, nous constatons que l'espace camping est occupé par un groupe de pré-ados d'un centre aéré qui fête ce soir la dernière journée de camp passée dans les lieux ...
Compréhensifs, les propriétaires nous offrent un emplacement à l'écart, sur une belle pelouse verte. Nous y serons très bien.
50 km nous séparent de notre objectif final du lendemain. Nous ne nous pressons donc pas au départ et c'est sous une petite pluie que nous franchissons les reliefs des premiers kilomètres, ceux du flanc Est de la Meuse où les combats de la bataille de Verdun ont été les plus apocalyptiques, les plus abominables, les plus meurtriers. Nous ne passerons qu'à 7 ou 8 km du fort de Douaumont au Nord de Verdun, lieu de mémoire bien connu.
La Meuse est rejointe par une belle route forestière descendante et roulante, le "chemin des américains". Explicite. Nous roulons quelques centaines de mètres sur la vélo-route de "La Meuse à vélo" (EV19) car notre cap est au S-O et nous y croiserons un couple de cyclistes. Ca faisait longtemps... La pluie forcit et nous oblige à sortir les ponchos. Pas pour très longtemps heureusement. Le front passe et derrière, la traîne remet le soleil dans le ciel, égaye le paysages et sèche rapidement nos habits humides.
Pique-nique au village d'Avocourt. Nous y ferons une nouvelle rencontre aussi fortuite qu'intéressante avec un voisin de la table de pique-nique où nous déjeunions et que nous avons sollicité pour remplir nos bidons ou nous indiquer une fontaine. Cet homme affable s'est trouvé être le maire du village. Nous voilà repartis pour presqu'une heure d'échanges sur plusieurs sujets en commençant par l'eau. Il nous explique les tracasseries administratives et les difficultés engendrées par les nouvelles législations, les lourdeurs des intercommunalités imposées et le découragement des hommes et femmes de bonne volonté qui s'investissent pour leur village. Il nous parlera du sien pendant la première guerre mondiale en nous pointant les positions des troupes dans le paysage, racontant pourquoi le monument au mort de la place de l'église est le seul de France a être surmonté d'une croix (laïcité oblige). Encore une belle rencontre qui atteste du désir de plein de ruraux de faire connaitre et aimer leurs territoires. Le plus souvent les maires se donnent du mal pour embellir leur commune, pour la rendre accueillante aux gens de passages comme nous. Ce n'était pas par politesse que nous tenions à lui dire combien nous apprécions ces efforts, partout en France (et ailleurs en Europe). C'était un désir sincère et profond de remercier un homme directement impliqué dans les décisions qui ont pour fruits ces petites infrastructures: tables de pique-nique, toilettes publiques, panneaux explicatifs. Il en était, en ce lieu et à ce moment, le représentant, le porte-drapeau modeste mais très digne. Il a reçu nos encouragements avec un bonheur sincère et visible. Ils étaient pour lui mais aussi tous ses collègues que nous n'avons pas rencontrés mais à qui nous avons si souvent voulu les exprimer.
Vive le cyclotourisme, même et surtout sur la soi-disant "diagonale du vide".
Peu avant 17h00, notre horaire cible, et après une dernière descente en forêt depuis la nécropole nationale de la forestière, dernier vestige du pire
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nous entrons au petit village de Lachalade à l'heure annoncée aux cousins de Catherine. La boucle est bouclée, sans aucun incident; pas même une crevaison (tu lis ça Henri?). Nous sommes tout simplement heu-reux! Superbe bambée de 750km, 5 pays traversés en 13 jours. Nous avons parcouru des paysages d'Europe pas si souvent choisis comme destination de vacances par les français. Ils ne sont que le décor, beaux mais rarement spectaculaires; peu instagramables. L'essentiel est ailleurs; dans les rencontres: famille, cyclos du forum, inconnus. Tant de gens ouverts aux échanges malgré les différences de langues ; accueillants. Et dire qu'en ces lieux, il n'y a pas si longtemps, tant d'hommes s'entretuaient sur ces terres en se questionnant "pourquoi ?"

Dernière modification par AngstromCyclo le dim. 3 sept. 2023 08:14, modifié 4 fois.


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Angstrom

"Un cyclotouriste n’a pas de palmarès, il n’a que des souvenirs… » Jean Taboureau

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JessicaB
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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par JessicaB »

Wouaaaa merci beaucoup pour ce chouette CR et les belles photos, j'y étais avec vous :D


"Pour ces messieurs la moralité devient rigide quand le reste ne l'est plus" © Coluche
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masu39
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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par masu39 »

Un vrai plaisir ce compte-rendu !


« Les pistes cyclables ne sont pas établies pour nous rendre service mais pour débarrasser les automobilistes de notre présence… Ce serait un calvaire de faire 200, voire 100 km dessus »
James Ruffier

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Re: 13 jours à vélo au cœur de l'Europe et de son histoire

Message par Beuzeville 130 »

Merci Vincent...
Ah les bars ! Avant l'arrivée d'Internet, on y trouvait le porte voix de la société. Maintenant, ce sont les réseaux sociaux :evil: ...
Pour moi, une sortie sans un arrêt bistrot ce n'est pas une sortie. Quand je suis dans un secteur inconnu, et que j'ai le choix, j'essaie de trouver le bar le moins tape à l’œil, le moins fréquenté... en plus si le mobilier est d'une autre époque, cela me va bien. Et si on peut y lire le quotidien du jour, c'est top.


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