Notre objectif, alors que la canicule assommait la France, était de rester au maximum au-dessus de la cote 1000, ce qui fut le cas en très grande partie. Seules les descentes dans les vallées de l'Alagnon et de la Truyère non loin de St Flour (et celle du Lot, à la fin) nous obligèrent à passer en dessous. Du coup, nous avons réussi à échapper à la canicule, en tous cas les nuits (11°C au réveil au bivouac de St Flour), aidés en journée par le vent qui a soufflé assez fort le jour de la traversée du Cézallier, de face mais qui nous a bien ventilés.
C'est un parcours magnifique. Comme je l'indique dans le titre, cette itinérance est unique (en France) par les paysages de grands espaces qu'elle nous offre à longueur de journées. C'est loin d'être plat. Nous grimpions environ 700 à 800 m par jour pour des étapes dépassant un peu les 50 km. Rien d'exceptionnel mais nous étions chargés comme pour toutes nos bambées cyclo-camping, sans compromis avec nos "éléments de confort".
Nous avons panaché les nuits en camping municipal, en aire naturelle et en bivouac. La nuit la plus coûteuse était à 15,60€, et l'aire naturelle d'Espinchal (63), 9,40€.
Pour la première fois dans une de nos bambées, nous avons passé 2 nuits au même camping, au Mont Dore, car je voulais grimper au sommet du Puy de Sancy. C'était une chouette balade qui offre elle aussi des points de vue exceptionnels. Elle commence au niveau de la source de la Dordogne (nous avons laissés nos destriers, sans sacoches, à côté de la gare du téléphérique toute proche). Ceux qui me connaissent par ce forum savent que je poursuis un objectif personnel original : celui de grimper à vélo au plus près de la source des fleuves et rivières qui ont donné leur nom à un département français. J'ai donc coché la Dordogne lors de ce voyage.
Je vous la fais donc un peu en mode "roman photo".
J1: Volvic - Le Mont Dore
Départ de la gare de Volvic. La veille, nous avions rejoint Clermont-Ferrand par la splendide ligne de feu "Le Cévenol" à travers les Cévennes et les gorges de l'Allier au départ de Nîmes. Commencer à Volvic au lieu de Clermont nous permettait de commencer le voyage plus au Nord, partie de la chaîne que je ne connaissais pas vraiment et faisait gagner quelques centaines de mètres de D+. Appréciable avec le temps chaud de cet été.
En fait, nous avons été surpris de trouver une température parfaite pour démarrer dasn d'excellentes conditions.
Nous empruntons des petites routes et même quelques chemins pour éviter ponctuellement une grosse route. La campagne est bien verte ici.
Nous passons à côté de Vulcania, puis à l'Ouest du spectaculaire Puy de Dôme.
Ca monte et monte encore jusqu'au lac de Cervière, splendide lac volcanique où nous aurions bien piqué une tête pour nous rafraîchir, mais c'est une réserve naturelle et c'est donc interdit.
Goûter savoureux.
Beaux paysages et cours de géologie à ciel ouvert.
Le soir, camping au Mont Dore.
J2: Boucle au Mont Dore et ascension du Puy de Sancy.
J'avais choisi de partir avec des sandales de randonnée DKT et des pédales BMX plates sur ce voyage pour pouvoir aussi faire cette rando pédestre. Bon choix. Modèle à 40€, il est suffisant pour ce type de rando et à vélo c'était parfait. Il faut juste penser à la crème hydratante anti crevasse sur les pieds car j'en ai eu rapidement. Heureusement, les crèmes sont efficaces et en quelques jours c'était fini. J'avais complété ces sandales par des crocs, très utiles au camping et surtout pour se baigner en rivière ou en lac pour éviter de se blesser sur les cailloux. Elles servent aussi lorsqu'il pleut car je les chausse alors avec des chaussettes. Je sais, c'est un gros "fashion faux pas" comme me le diront mes nièces mais les crocs sont très légères.
Vue du sommet vers le Sud avec les Monts du Cézallier que nous traverserons en J4, ainsi que les Monts du Cantal, au fond.
Pas de carton à tamponner pour moi. Juste une photo souvenir de mon passage à la source de la Dordogne, en réalité le confluent de 2 torrents, le Dore et la Dogne.
J3: Le Mont Dore - Espinchal
Etrange phénomène subi en démontant notre tente ce matin. Après un réveil frisquet à l'ombre, nous sentons au même moment et subitement avec mon épouse une vague d'air chaud. La canicule nous rejoint là et à cet instant. Dommage, pensons-nous car nous allons commencer la journée par une remontée à l'Ouest du Sancy. En fait, dans les vallons blottis dans la forêt, nous trouverons encore des poches d'air froid, qui, avec l'ombre des épicéas qui nous entourent, nous préservera pendant une bonne partie de la matinée. Nous débouchons ensuite sur le plateau Sud du Sancy que nous gardons en vue dès que la route s'échappe d'un vallon.
Après une longue pause casse-croute et sieste à l'ombre et exposée à une gentille brise, nous reprenons la route pour Egliseneuve d'Entraigues, là où l'inénarrable Patrick Plaine se prend un orage carabiné dasn le film "Roule Toujours" (à voir absolument pour ceux qui ne connaissent pas; dispo sur le net en visionnage libre). Baignade divine sous l'une des cascades.
Nous arrivons à l'aire naturelle de camping d'Espinchal où nous avions prévu de faire étape. Un ancien camping municipal déclassé pour cause de zone inondable qui continue sa vie comme aire naturelle. 9,60€ perçu au passage de la receveuse, vers 20h30, une femme très gaie et sympathique qui remplit soigneusement le carnet à souche pour nous donner le reçu lorsque retentit le klaxon du boulanger itinérant. Il tombe à pic. Outre le pain et les croissants pour le lendemain, nous lui achetons un délicieux chèvre frais qui nous combleras pour ce dîner assez frugal. C'est aussi ça le plaisir de ces voyages à vélo: les rencontres improvisées, les achats de spécialités locales à des commerçants totalement impliqués dans une mission commerciale, certes, mais également de service au public.
J5: Espinchal - Neussargues
Lever tôt pour pouvoir rouler le plus possible avant les trop grosses chaleurs. Jusqu'au dernier moment, nous hésiterons sur l'itinéraire car le vent est déjà soutenu et la météo annonce un fort vent du Sud aujourd'hui. Notre plan et grosse envie était de passer par les monts du Cézallier, mais ils sont dénudés et hauts: ils nous exposeraient au maximum au vent pile dans le pif. L'autre option est de redescendre puis de remonter vers Allanche, par une route assez importante donc large et passante. Plus raisonnable mais cela amputerait d'une étape qui avait largement motivé le choix de cette région pour notre voyage. Nous serons fous. La raison n'est pas toujours conforme à l'idée qu'on s'en fait: nous choisirons de grimper à 1400 m proche du sommet du Cézallier.
Le début est pourtant un peu difficile car la viennoiserie avalée au petit dej, très bonne a du mal à être digérée par ma cyclote.
Pourtant, les paysages sont juste magnifiques, grandioses dasn la lumière du matin.
Nous gagnons les estives où prés de fauche alternent avec pâturages.
Les arbres se font plus rares, cantonnés aux combes et vallons ce qui nous expose au vent. Mais le bonheur est intense, autant que l'effort pour hisser nos montures par delà les côtes aux pourcentages taquinant quelques fois les nombres à 2 chiffres.
Catherine grimpe avec courage mais lentement à cause de ses problèmes de digestion, ce qui me donne du temps pour me retourner et contempler le terrain parcouru depuis 2 jours: au loin le Sancy, l'amer remarquable de notre navigation sur ces hauts plateaux, continue d'assumer son rôle. Il rétrécit à mesure que les volcans cantaliens grossissent et prennent le relais, légèrement dans le Sud-Ouest.
Nous pénétrons dans le département du Cantal, accueillis par la reine de ces terres au port altier, la Salers.
Dans une combe précédent la dernière montée vers Montgreleix, nous ferons une pause pour permettre à la digestion de ma cyclote de se faire sans concurrence. Tout est calme. Aucun cyclo; de rares, très rares voitures de paysans. Je m'assis à terre et très vite, suis intrigué par des bruissements dans les taillis bordant la route où nous avons stoppé nos vélos: j'observe avec l'émotion et l'émerveillement du petit garçon que je n'ai cessé d'être les allées et venues d'une belette. Quelle rapidité! Quelle vivacité! Elle m'a vu, bien sûr, mais ne s'en soucie guerre car je reste immobile, contrairement à elle qui ne tient pas en place. Par ici, par là! Elle disparaît derrière un tronc puis réapparait, fait le chemin inverse une énième fois. Joue-t-elle? Chasse-t-elle? Je ne le saurai pas. J'arrive tant bien que mal à prendre quelques photos. Aucune ne sera nette car mon compact n'est pas assez rapide pour elle.
C'est du cyclotourisme lent, super slow, même. Celui qui me convient le plus, finalement. Je ne suis plus la goutte qui glisse rapidement le long du papier glacé, traverse le paysage comme une flèche, efficace et même performante. Je suis celle qui peine à se frayer son chemin, hésite et finit par se perdre dans le papier journal en s'imprégnant dans les "pays" traversés comme dans un buvard.
Montgreleix. Premier - ou dernier - village du Cantal, c'est selon, est atteint. Je le connais bien de nom à force d'étudier les cartes et les itinéraires dans ce coin, pour des pérégrinations, tantôt sur 2 roues, tantôt sur 2 lattes, tantôt dans le désert vert (jaunâtre) de l'été ou blanc de l'hiver. Village perché, non pas sur un roc saillant et vertical mais sur un mont arrondi, comme ils sont par ici. Village au premier coup d'œil désert, presque fantôme mais qui se révèle quand on atteint sa place centrale: beau petit hôtel restaurant, tenancier sympa à qui on achète un coca pharmaceutique pour ma cyclote (ça fait vraiment des miracles sur la digestion, cette boisson, en retirant les bulles).
S'ensuit une assez grande descente qui annonce la longue, très longue montée qui nous attend, en direction du Col de Chamaroux. Cette fois-ci je n'irai pas, compte tenu de l'heure, faire le crochet par le monastère orthodoxe perdu dans un recoin de la vallée que nous remontons, de l'autre versant. Je me contenterai d'apercevoir le bulbe doré de la chapelle brillant à travers les (rares) arbres. Les rapaces s'adonnent avec dextérité et probablement beaucoup d'amusement au vol de pente sur les flancs des rebonds du relief que nous traversons pour arriver au col. Bien entendu, on s'y arrête pour un petit ravito et pour la photo de rigueur (c'est pas le Galibier ici; seul s'y trouve un promeneur opportunément arrivé avec sa voiture à qui nous demanderons de nous prendre en photo, car nous maîtrisons mal la technique du selfie).
Mais cette fois-ci, le franchissement du col n'annonce aucune descente imminente. En effet, l'itinéraire choisi nous entraine sur la piste qui continue de grimper de plus belle jusqu'à la côte 1459, point culminant du voyage.
J'avais bien entendu prévenu ma cyclote de ce passage difficile où elle devrait descendre de vélo car elle est montée en pneus de 28 (et la pente est raide). Je ferai donc pendant 2 km des allers-retours: je grimpe sur mon vélo, le laisse, redescends pour pousser le sien. Arrivé à l'ombre d'un groupe d'arbre courageux, je découvre 2 femmes d'âge aussi mûr que le nôtre entrain de faire une pause. Elles sont sur des splendides VAE allemands touts équipés de belles sacoches Ortlieb. Ca alors!! Sur cette piste rocailleuse improbable! Ce sont 2 jeunes retraitées (contrairement à nous) qui voyagent à vélo et qui empruntent ce chemin, dasn l'autre sens (c'est plus malin car elles sont sur cette partie difficile à la descente; de l'autre côté, c'est goudronné plus haut et moins raide). Ce passage difficile, vent de face, est néanmoins absolument magnifique.
Bien que le vent du Sud apporte une atmosphère un peu brumeuse qui estompe les horizons si vastes et nous cachent les massifs visibles par temps plus clairs, c'est avec énormément de plaisir que nous retrouvons cette contrée découverte il y a 2 ans et demis skis aux pieds. Nous rencontrons une nouvelle fois des cyclo voyageurs sur cette piste, au point culminant: un jeune coupe avec un jeune bébé dasn sa cariole. Le voyage à vélo hors des sentiers battus est décidément tendance! Ca fait plaisir.
Nous progressons vers Pradiers. La piste s'améliore jusqu'à être bitumée. La vue sur les Monts du Cantal est à couper le souffle.
La descente qui se présente est somptueuse mais malgré le vent de face, toujours fort, nous sentons la canicule nous étouffer au fur et à mesure que nous perdons de l'altitude. Nous ne nous arrêterons quasiment plus jusqu'à notre destination, le camping de Neussargues. Pradiers, Allanche sont traversés. A Allanche nous ferons une courte halte pour remplir nos bidons d'eau fraîche, pour nous asperger et tremper nos maillots. La route d'Allanche à Neussargues n'est pas super agréable: large assez passante. Tellement différente de ce que nous avons roulé depuis ce matin (il faudrait transformer l'ancienne voie ferrée en voie verte; elle suis la même vallée mais sur l'autre versant, et semble souvent ombragée cette voie ferrée sert actuellement à une activité vélorail). Heureusement, le camping de Neussargues est situé en bordure de l'Alagnon où nous nous baignerons et nous rafraîchirons jusqu'au coucher en pique-niquant sans jamais trop nous éloigner de la rivière.
Dans la nuit, le temps va changer. La canicule est finie. Quelques gouttes nous surprendront au petit matin, signe de ce changement météo si bienvenu.
Finalement j'ai fait plus long que prévu initialement. Je terminerai dans la semaine et je publie déjà ce que j'ai écrit depuis fin juillet par petites touches.
La carte: